RTE veut faire passer le courant avec le monde agricole.
Le renforcement de l'axe électrique entre l'Eure et la Seine-Maritime est forcément impactant pour l'agriculture.
Lundi 18 décembre à Eturqueraye (27) et jeudi 21 décembre à La Frénaye (76), RTE avait convié la profession
pour répondre aux questions légitimes des agriculteurs.
fin 2029.
Le courant passe-t-il entre RTE (Réseau de Transport d'Electricité) et le monde agricole, Pour l'instant « oui ». Les relations ne sont pas sous haute tension et l'heure est à la concertation. A la veille de Noël, deux réunions d'information ouvertes au monde agricole, mais aussi aux élus locaux, ont permis de faire un point de pré-chantier. Pour le transporteur d'électricité, il s'agit de déminer le terrain sur lequel il va implanter une ligne aérienne de 400 000 volts reliée par 60 pylônes et une ligne souterraine de 225 000 volts. Pour les agriculteurs potentiellement concernés, il s'agit d'anticiper et mesurer les impacts négatifs à court, moyen et long terme pour négocier les compensations légitimes de la gêne occasionnée.
TROIS FUSEAUX EN BALANCE
« Une réunion qui ne sert à rien puisque la décision est déjà prise ». A la première banderille lancée par un agriculteur, Benoît Facq (directeur du projet) répond « non. Le fuseau qui suit les lignes existantes à la préférence des élus mais cela ne laisse présager en rien le tracé final ». Trois hypothèses sont donc bien en balance avec pour objectif « de trouver la solution la moins impactante. En avril 2024, on validera un fuseau. C'est-à-dire un principe de passage mais on ne sera pas capable de vous dire si le pylône sera implanté dans telle parcelle où celle d'à côté, voire à cheval entre les deux ». Mais au fait, la solution la moins impactante certes, mais pour qui ? C'est ici que le bât blesse un peu. L'intérêt des collectivités locales n'est pas forcément celui de la Ferme Eure ou Seine-Maritime et concilier l'intérêt général à l'intérêt individuel peut tenir de la gageure.
UN LOURD TRIBU AGRICOLE ?
Entre la réserve naturelle de l'estuaire de la Seine et celle du Marais Vernier, la pression foncière pourrait monter d'un cran. « On subit la double voire la triple peine. On va perdre des terres agricoles de façon directe, 150 m2 par pylône, et indirecte à cause de la compensation en replantant par exemple des forêts, de la compensation sur des terres que l'on exploite. Nous sommes la variable d'ajustement et même les oubliés de l'affaire. Nous aussi, on a le droit d'exister, de vivre et de se développer. Chez nous, quand un hectare se libère, 30 personnes sont déjà candidates », a-t-on pu entendre à Eturqueraye et La Frénaye.
Réponse de RTE : « nous comprenons cette image de double peine mais nous répondons à une demande de besoin supplémentaire en électricité. Participez à la concertation pour apporter votre point de vue ». Le pot de terre contre le pot de fer en quelques sortes mais un chemin pavé encore de quelques bonnes intentions. Dans ce projet structurant pour la société et même si la marge de manoeuvre est restreinte, il y a encore du négociable sur le plan pratique et de la compensation économique à décrocher.
SYNDICALISME ET CA VEILLENT AU GRAIN
C'est à ce niveau que Chambres d'agriculture et syndicalisme agricole veillent à la ligne. Jérôme Métel (responsable du service aménagement/urbanisme à la Chambre régionale d'agriculture de Normandie) est venu éclairer le débat.
Le premier chantier en cours est l'identification des sièges d'exploitations concernés, l'usage de l'ensemble des bâtiments au sein de chaque corps de ferme... « Au niveau agricole, les dés ne sont pas jetés », est-il convaincu. C'est par exemple le cas avec les modalités d'indemnisation de passage des lignes électriques en milieu agricole. Il existe le PNA (Plan National d'Actions) signé entre RTE et la profession agricole sur lequel la FNSEA a oeuvré. Il reste à construire la CLA (Convention Locale d'Application) sur laquelle FNSEA 27 et JA entendent bien peser de tout leur poids. La CLA a vocation par exemple de mettre un peu d'huile dans les rouages en désignant des référents agriculteurs en cas de litige.
Un plus dans l'accompagnement des travaux qui s'étaleront pour chaque pylône à 6 mois donc une récolte. Tant du côté de RTE que des agriculteurs, il ne faut pas se louper dans l'exécution des grandes étapes d'un tel chantier. Il faudra faire un état des lieux d'entrée et de sortie. « On peut verser une partie de l'indemnisation avant la fin des travaux », illustre en guise de bonne volonté le responsable technique du projet. Et de rappeler que pour les 160 km de la ligne Contentin/Maine en service depuis 10 ans, « tout s'était bien passé ».