Cidre : la croissance passe par l’innovation.
Les chambres d’agriculture de Normandie ont organisé jeudi en visioconférence leur quatrième forum d’innovation, qui permet de découvrir des travaux qui pourraient révolutionner l’agriculture à plus ou moins long terme.
Pour le quatrième forum d’innovation, organisé jeudi dernier par les chambres d’agriculture de Normandie, l’institut français des productions cidricoles (IFPC) avait choisi de présenter ses recherches sur les pommes à chair rouge. Celles-ci ont débuté en 2015 et les premiers résultats sont encourageants. L’objectif de ce programme de recherche, c’est de pouvoir proposer un nouveau produit sur le marché français, le cidre rosé, avec l’aide de variétés adaptées. « Les producteurs souhaitent gagner de nouveaux consommateurs en élargissant la gamme, en proposant des cidres aromatisés et des cidre rosés, constatant que les vins rosés pétillants sont à la mode », explique Marie-Cécile Vergneaud, agronome à l’IFPC. Elargir la gamme pourrait permettre de sortir de l’image trop véhiculée : le cidre se consomme à l’Epiphanie et à la Chandeleur. La couleur serait donc un levier pour conquérir un nouveau public, plus urbain et plus féminin.
UN JUS COLORÉ SANS OXYDATION
L’IFPC et l’Inrae ont réalisé un travail de sélection sur une trentaine de variétés de pommes à chair rouge pour arriver au résultat attendu : un cidre qui conserve sa couleur rose naturelle, ne nécessitant pas l’utilisation de colorants additionnels. La coloration des cidres issus de pommes à chair rouge est due à un polyphénol, l’anthocyane, proche des composés colorés du vin. Les anthocyanes viennent en plus des polyphénols responsables de la couleur jaune. Dans les variétés classiques, ces anthocyanes se retrouvent essentiellement dans la peau, et seules les pommes à chair rouge en contiennent aussi dans la chair permettant de produire un jus coloré sans oxydation.
Cependant, elles ont tendance à perdre la couleur après quelques mois en bouteille quand de l’air est incorporé lors du conditionnement. « On suit les arbres depuis 2015 et on a transmis les pommes à nos collègues qui travaillent sur la transformation. Ils ont fait des jus, et des oxydations forcées pour voir si la couleur rouge demeurait », détaille Marie-Cécile Vergneaud. Parmi les variétés évaluées, une dizaine ont été écartées car elles virent au orange. Celle qui présente le plus d’intérêt est la rouge de Ruiz, une variété de pomme sauvage du Kazakhstan, qui au départ, est une variété de pommes à couteau. « Quand on coupe cette pomme, c’est comme un steak, c’est très très rouge », remarque Marie-Cécile Vergneaud.
Des résultats complémentaires sur les plantations de 2017 sont attendus en 2022 mais les premiers retours sont encourageants. « Techniquement, pour celui qui transforme, cela ne change rien au procédé, on ajoute des pommes à chair rouge avec des pommes traditionnelles. Il faut juste être vigilant car la couleur arrive avant la maturité de la pomme et son intensité diminue ensuite ». La rouge de Ruiz a été inscrite au catalogue pour pouvoir être multipliée et prochainement commercialisée. Le travail de sélection variétale se poursuit, avec des tests où elle est croisée avec d’autres variétés.