Dans la Manche : 6 ME pour chauffer 1 000 foyers.
Le développement de la méthanisation en Normandie se poursuit. A l'image de l'unité de la société Metha LBMH, basée à Juvigny-les-Vallées (sud-Manche), mise en service en mars dernier. Dans la Manche, il s'agit du second site de méthanisation qui injecte du gaz vert dans le réseau GRDF et le 12e en Normandie.
Six millions d'euros investis, subventionnés à hauteur de 15 %, un million de normo mètres cubes de biométhane injectés dans le réseau de distribution GRDF, près d'un millier de foyers alimentés en chauffage et eau chaude. Voilà les principales caractéristiques de l'unité de méthanisation mise en service en mars dernier à Juvigny-les-Vallées. A l'origine du projet : deux exploitations agricoles situées à seulement 1 500 m l'une de l'autre, le Gaec Legeard composé de deux associés, deux salariés et deux apprentis, spécialisé en lait et le Gaec Martin Hamel (cinq associés, un salarié), spécialisé dans le lait et le porc.
Faire du gaz vert
Le projet remonte à quelques années. « Nous avions eu une réflexion à l'échelle du Val de Sée pour un projet collectif. Il ne s'est pas fait », se rappelle Jean-Yves Hamel, directeur général de Métha LBMH. Pour autant, l'idée de transformer la matière organique en énergie renouvelable ne l'a pas quitté. « C'est donner une valeur à une matière qui était considérée comme déchet », ajoute-t-il. Une rencontre en 2017 avec GRDF a fini de le convaincre, en optant non pas pour la cogénération mais l'injection dans le réseau. « C'était le virage à prendre. Pour nous, la méthanisation permet de renforcer les activités agricoles et les sécuriser », ajoute Bruno Legeard, président de Métha LBMH. Le réseau GRDF, situé à 8 km du site, permettait de croire en la faisabilité du projet et de se lancer.
Les vannes ouvertes en mars 2021
La société a ainsi été créée en juillet 2018. Les travaux ont débuté l'année suivante pour se poursuivre tout au long de 2020. Et le 9 mars 2021, « nous avons ouvert les vannes », se réjouissent les deux agriculteurs. Cette unité de méthanisation permet de produire du biométhane provenant essentiellement des deux exploitations agricoles, partenaires du projet. Et elle génère également du digestat pour fertiliser les terres. Au total, le gisement interne, composé de fumier, lisier, menues pailles, ensilage maïs et Cive (cultures intermédiaires à vocation énergétique), est de l'ordre de 17 000 tonnes par an, représentant 84 % de l'apport total. Il sera complété par du fumier mou de deux exploitations voisines et de déchets de céréales provenant d'un négoce. « La matière organique doit être fraîche, de moins d'une semaine. Alors, on va chercher le fumier et on va étendre le digestat sur leurs parcelles. C'est un moyen pour eux de résoudre le problème de stockage », explique Bruno Legeard. A terme, plus d'un million de normo mètres cubes de biométhane seront injectés dans le réseau GRDF, ce qui équivaut à la consommation annuelle en chauffage et d'eau chaude de plus de 900 foyers.
Se donner les moyens d'investir
Pour cette unité de méthanisation, les agriculteurs ont investi 6 millions d'euros, aidés à hauteur de 15 %, le montant d'aides maximales. Un investissement lourd, mais qui a trouvé écho chez les financeurs. « Les banques restent frileuses et demandent des apports de fonds propres », déplore un des responsables. Et pourtant, « il faut se donner les chances d'investir », ajoute-t-il, notamment au moment où l'élevage s'effondre, « il faut pouvoir donner envie aux jeunes de revenir sur l'exploitation ».
Pour les deux Gaec, la méthanisation a été la réponse pour garder une agriculture rémunératrice et attractive. Quant à l'acceptation sociale, les agriculteurs n'ont fait face à aucune opposition « On a échangé avec le conseil municipal, on a présenté le projet. Le choix du site est important. C'est pour cela qu'il est adossé à une exploitation, dans le but de limiter des nuisances supplémentaires », conclue-t-il. Désormais, cette unité de méthanisation permet de répondre aux enjeux de la transition énergétique, à savoir la production d'énergie verte, la valorisation de déchets organiques du territoire et la contribution au recyclage local des éléments fertilisants.