Des agriculteurs sur le chemin de l'école.
Après avoir accueilli une classe de CM2 dans sa ferme en juin dernier, Stéphane Vacher, installé à Fresne-l'Archevêque, renouvelle l'expérience. Mais le 12 décembre dernier, c'était à lui de retourner à l'école, accompagné d'un autre agriculteur, Jules Figeureu.
Lors de l'année scolaire 2018-19, trois binômes d'agriculteurs, dont faisait partie Stéphane Vacher, ont participé à un projet pilote initié par l'antenne de la chambre d'agriculture des Andelys, en partenariat avec l'Éducation nationale. Durant l'hiver, chaque binôme a présenté son activité dans une classe primaire, puis aux beaux jours les élèves ont visité leur exploitation. Entre temps, agriculteurs et enfants ont communiqué par l'interface Monchamp.fr. En fin d'année scolaire, après les retours unanimement positifs des uns et des autres, la chambre d'agriculture des Andelys et l'Éducation nationale ont souhaité renouveler l'opération. L'espoir était de doubler le nombre de binômes, soit 12 volontaires. « En fait nous avons triplé avec neuf binômes, ce qui démontre l'attractivité et la viabilité de ce dispositif.
Pour l'Éducation nationale, c'est un véritable projet pédagogique, pour les agriculteurs, c'est un très bon moyen de communiquer sur leurs métiers. Les participants de l'année dernière, comme Stéphane Vacher, ont été associés à des nouveaux,» explique Karine Magnan, assistante de l'antenne des Andelys, qui mène ce projet avec Anne-Laure Marteau et Marilyne Michaud.
C'est ainsi que Stéphane Vacher a proposé à un jeune agriculteur de Bacqueville de former un nouveau binôme avec lui pour l'année scolaire 2019-20. « Cinq minutes ont suffi pour me convaincre. Montrer concrètement ce qu'est l'agriculture à des élèves de primaires est un bon moyen de lutter contre l'agribashing,» confie Jules Figeureu, 28 ans,installé en polyculture et en élevage laitier.
Ce matin du jeudi 12 décembre,le binôme s'est donc rendu le sourire aux lèvres dans la classe de CM2 de Mikaël Gorrity à Bernouville. Ce professeur des écoles connait bien Stéphane Vacher, puisque c'est sa classe qui est venue dans sa ferme enjuin dernier. « Nous avions la volonté de travailler à nouveau ensemble. Pour ses élèves, Mikaël est venu faire des photos chez moi pendant les vacances de la Toussaint. J'apprécie beaucoup son investissement, » explique l'agriculteur.
LE SUJET LES INTÉRESSE BEAUCOUP
Le professeur des écoles y trouve son compte « Pour moi ce projet est un bon moyen de sortir mes élèves du quotidien scolaire. Le sujet les intéresse beaucoup, même ceux qui sont d'habitude les moins attentifs. Ça les change du virtuel de leurs écrans. » Tout au long de l'année en plus de leurs échanges avec des agriculteurs, les élèves de Mikaël Gorrity entretiennent aussi un potager dans leur l'école, mis en place par leur professeur il y a une quinzaine d'années. Lorsque Stéphane Vacher et Jules Figeureu sont venus les voir en classe, ils avaient déjà planté du blé, du colza et des pois fourragers dans un carré. Sur 23 élèves environ 7 ont des agriculteurs dans leur famille, 10 ont visité une ferme en dehors des visites scolaires.
Le programme de la matinée tourne autour de la présentation des cultures de la région et des exploitations des deux agriculteurs. Grégoire répond dans le mille à une question de Stéphane Vacher, à sa grande surprise : « la luzerne, ça se récolte avec une ensileuse.... je le sais mon grand-père est agriculteur. » Les élèves ont ensuite une question très pertinente à poser : dans ce que vous produisez y a-t-il des aliments qui peuvent se conserver très longtemps ? Stéphane Vacher en profite pour donner une petite leçon de biologie : « une fois qu'une graine a fait son cycle, si elle est conservée à l'abri de l'humidité, elle peut être conservée très longtemps.»
Jules Figeureu, éleveur laitier, explique ensuite aux enfants ce qu'est une génisse. Lorsque cet éleveur demande comment s'appelle le bâtiment qui abrite les vaches en hiver, un seul élève répond : « euh... la bergerie ? » L'occasion donc d'enrichir le vocabulaire de ces CM2 avec le mot étable. Nouvelle occasion aussi quand ils découvrent qu'on ne retourne pas la terre avec une« charèle », mais une charrue. Pour se rattraper, les élèves de Mikaël Gorrity apprennent ensuite la différence entre la Normande et la Prim'Holstein. À la fin de la séance, ils expriment tous leur hâte de venir visiter la ferme des agriculteurs en mai. Mikaël Gorrity les prévient que pour cela il va falloir être sage en classe. Et, pourrait-on rajouter, ne plus dire bergerie pour étable. De quoi rendre fou un troupeau.