La filière chanvre en orbite régionale et plus si affinité.
Hervé Morin (président de la Région Normandie) et Clotilde Eudier (vice-présidente en charge de l’agriculture) ont officiellement lancé, ce lundi en plein cœur de la nouvelle chaîne de teillage de la coopérative linière du nord de Caen à St-Manvieu-Norrey (14), la filière chanvre.
« C’est un grand jour pour la Région ». Après la bière et le vin, c’est la filière chanvre qui vient de recevoir la bénédiction de l’exécutif régional. « Une filière où l’on n’est pas dans le bricolage avec une volonté politique qui s’appuie sur des acteurs économiques », a insisté Hervé Morin soulignant au passage que ce projet s’appuie sur le modèle coopératif. Avec notamment NatUp et la coopérative linière du nord de Caen, la sole de chanvre devrait atteindre 700 ha cette année. On est encore loin des 12 000 ha de betteraves sucrières que l’ex-bassin Cagny St-Louis Sucre a perdus, mais « une filière en laquelle personne ne croyait il y a quelques années », mais qui est en pleine structuration. « Il faut continuer la construction d’un aval que nous avons perdu au siècle dernier ».
UNE RENTREE EN JEAN
Lundi à St-Manvieu-Norrey, Hervé Morin s’est vu remettre un second jean à base de chanvre. Le premier, offert au SIA, s’est avéré trop petit. Pour la commercialisation, on peut d'ores et déjà précommander sur le site de la marque « Drekks » pour une livraison en septembre. Avec l'implantation de la French Filature et les ateliers de confection en Normandie, on pourra se « pantalonner » en économie circulaire avec un produit biosourcé et écologiquement irréprochable. « Le chanvre dispose d'un capital sympathie. Toutes les grandes marques en demandent », constate-t-on du côté de NatUp. « On est parti de rien. On a levé les verrous avec la première machine. Puis emmené les teilleurs et maintenant l'aval avec les filateurs. On vous a suivi et on n'est pas déçu de cette réussite » s'est félicitée Clotilde Eudier.
MIRACLE DE LA NATURE
Une réussite liée au hasard de rencontres fertiles mais qui s'appuie surtout sur la volonté farouche de femmes et d'hommes persuadés et persuasifs. Marc Vandecandelaere et Henri Pomikal (président et vice-président de la coopérative linière du nord de Caen) accompagnés notamment de Nathalie Revol (association lin et chanvre bio) ont retracé la genèse du pourquoi et du comment. Dans un contexte de réchauffement climatique, le chanvre coche toutes les cases d'une culture d'avenir. « Le chanvre est un miracle de la nature » a imagé Henri Pomikal. « Une culture qui dégage du revenu, sans intrants, et qui va remplacer la betterave sucrière », a enchaîné Marc Vandecandelaere.
Attention cependant à ne pas brûler les étapes en voulant aller trop vite. Le parc matériel doit suivre. Il y aurait à ce jour 6 faucheuses automotrices en précommande chez Hyler, le fabricant belge qui aurait toute légitimité à s’installer en Normandie selon Hervé Morin. Autre point de vigilance, trouver la bonne articulation avec la filière chanvre technique. « Deux filières complémentaires, a expliqué Jean-Paul Salmon, dirigeant d’Agro Chanvre (Barenton-50). Il faut nouer des partenariats et, depuis un an, nous travaillons ensemble. Nous reprenons à la coopérative ce qui est hors cahier des charges textile. On peut par exemple transformer les pailles qui ne sont pas rouies ».
Et si à terme, le chanvre venait concurrencer le lin ? Pas de danger ! C’est le coton qui est dans l’œil du viseur. Sur le plan social et environnement, ce n’est pas la ouate que le consommateur préfère. Ce sera encore plus vrai demain.