La résiliation du bail rural, illustrations...
Les conditions et les règles régissant la résiliation du bail rural sont strictement encadrées par le Code rural. Leur application et leur interprétation se traduisent dans les décisions de justice prises. Elles constituent la jurisprudence qui peut aussi évoluer en fonction du contexte et des circonstances : illustrations.
Pas de résiliation pour des défauts de paiement de fermage antérieurs au renouvellement du bail
LES FAITS : Un bailleur est victime d'un défaut de paiement de deux échéances de fermage, annuelles et consécutives, en 2014 et 2015. Dans les deux cas, il envoie une mise en demeure au preneur, mais ce dernier s'abstient de payer les sommes dues dans les 3 mois suivant leur réception. Le bailleur saisit alors le tribunal pour voir prononcer la résiliation du bail.
Réponse : Cassation civile 3, 21 janvier 2021
Selon l'article L.411-31 du CRPM, pour agir en justice et obtenir la résiliation du bail, le propriétaire doit justifier de deux échéances de fermage, consécutives ou non, impayées et chacune ayant fait l'objet d'une mise en demeure restée sans effet pendant un délai de 3 mois. Si les conditions semblaient réunies, les juges n'ont cependant pas donné gain de cause au bailleur. Pourquoi ? Son action en justice a été engagée après le renouvellement du bail, intervenu en 2016, et non pendant le bail initial au cours duquel les impayés avaient eu lieu. Pour la Cour de cassation, le renouvellement entraine la formation d'un nouveau contrat de bail et le bailleur ne peut pas en demander la résiliation en invoquant des impayés de fermage dus au titre du bail précédent et expiré.
Résiliation totale du bail pour manquement du preneur aux obligations liées à la maison d'habitation
LES FAITS : Un bail de carrière est conclu sur un domaine agricole comprenant à la fois une maison d'habitation et des terres. Les propriétaires en demandent la résiliation pour manquements du preneur à ses obligations, le bâtiment étant devenu inhabitable.
Réponse : Cassation civ 3, 10 septembre 2020
Le preneur s'est abstenu de veiller au bon état d'entretien du logement loué et n'a pas assuré le bâtiment. Les juges ont estimé que l'abandon caractérisé de l'un des bâtiments du domaine constituait une négligence qui compromettait l'avenir du fonds au sens de l'article L.411-31 du CRPM. En conséquence et compte tenu de l'indivisibilité qui caractérise tout bail rural jusqu'à son expiration, la résiliation totale du bail, bâtiment et terres, a été prononcée.
Pas de résiliation en l'absence de manquement à l'obligation d'exploiter du preneur
LES FAITS : En 2008, un propriétaire loue des parcelles de vigne à une société et lui reproche, en 2017, d'avoir arraché la totalité des plants. La SCEA saisit le tribunal paritaire des baux ruraux pour faire constater qu'elle n'a commis aucun agissement compromettant la bonne exploitation du fonds. En réponse, le propriétaire saisit alors la même juridiction pour résiliation du bail.
Réponse : Cassation civ 3, 12 novembre 2020
Elle affirme qu'en application des articles L.411-31 et L.411-27 du code rural et 1766 du Code civil, le bailleur ne peut faire résilier le bail pour faute du preneur qu'à la condition que les agissements de celui-ci soient de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds. Dans les faits, un rapport d'expertise avait constaté l'ancienneté des pieds de vigne et préconisé leur arrachage afin d'assurer la rentabilité de l'exploitation. Les preneurs avaient alors, en lieu et place du bailleur qui avait négligé d'y procéder, entrepris les travaux nécessaires à la restructuration du vignoble. La Cour de cassation a décidé que la résiliation pour défaut d'exploitation du fonds n'était pas caractérisée et ne pouvait donc pas être retenue.
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