Une usine de fibres naturelles en plein coeur de la biomasse.
Début août, on coupait du chanvre du côté de Villons-les-Buissons (nord de Caen). Charles et Anne Reboux, cofondateurs de RBX Créations en Charente-Maritime (entreprise propriétaire de la marque de vêtements écoresponsables Gorfoo) étaient sur place pour évoquer leur projet de création d'une usine de fabrication de cellulose et fibres naturelles en plein coeur de ce territoire.
A tirer la ficelle de la pelote, on ne sait pas toujours où cela va s'arrêter. C'est sans doute ce que doivent penser les pionniers de la culture du chanvre en Normandie. Roue de secours d'un assolement appauvri par le coup de Jarnac de Südzucker qui a privé les fermes calvadosiennes et ornaises de la culture de la betterave sucrière, le chanvre développe sa sole normande. Mieux encore, d'ici deux ans et avec une cinquantaine d'emplois à la clé, la première pierre d'une usine de fabrication de cellulose de haute qualité, transformée ensuite en fibre, pourrait être posée. La Région prend l'affaire au sérieux.
50 EMPLOIS A LA CLE
Rien n'est encore fait mais l'optimisme est de mise. « Aujourd'hui, l'heure est à la recherche de budgets pour lancer l'étude de faisabilité industrielle et le schéma d'usine », avancent droits dans leurs bottes Charles et Anne Reboux. Leurs bottes, enfin plutôt leurs baskets, car Charles est ancien podologue et technicien de la chaussure. Ses compétences comprennent la biochimie, l'ingénierie des procédés, l'agriculture et la chaîne d'approvisionnement mondiale. Sa soeur Anne est diplômée de Telecom Ecole de Management et de l'Université de Technologie de Sydney. Elle a passé trois ans en Australie et travaillé comme consultante chez EY (Paris, Sydney) puis Epsilon. Elle a développé une expertise en cadrage et gestion de projets ainsi qu'en stratégie. Deux têtes bien faites et des valeurs sociales et écologiques revendiquées à travers leur marque Gorfoo qui privilégie les matériaux durables et alternatifs tels que le chanvre du Vietnam, la ramie de Chine ou bien encore le liège portugais... Mais à l'heure du défi de la relocalisation industrielle, portée par l'Etat et la Région, c'est sur le lin, le chanvre et le miscanthus normands que Charles et Anne jettent leur dévolu. « Nous nous implanterons sur le territoire qui sera à même de nous fournir la plus grande quantité de biomasse. » C'était le sens de leur présence, début août, dans le Calvados : vérifier avec les acteurs locaux les garanties d'un approvisionnement estimé à ce jour à 35 000 tonnes par an. Un train à prendre pour les teilleurs, coopératifs et privés, mais aussi la plupart des oubliés de la sucrerie de Cagny et les investisseurs éventuels.