FABRICE MOULARD, président de la FNSEA 27
Echanges avec le Président de la FNSEA27 qui livre son sentiment sur l’épidémie, le confinement et ses conséquences, le déconfinement, les perspectives avant moisson.
Fabrice Moulard, vous souhaitiez vous exprimer dans l’Eure Agricole et Rurale ; pour quelles raisons ?
D’abord, j’ai l’impression que cela fait longtemps que je n’ai pas pu m’exprimer face aux agriculteurs de l’Eure. Notre assemblée générale annuelle publique qui est un grand moment de notre vie syndicale a été annulée en mars car le confinement a été proclamé deux jours avant. Nous sommes ensuite restés confinés comme tous les français et le contact avec les agriculteurs n’a pu se tenir comme nous en avions l’habitude avec passion et convivialité. Nous organisons d’ici au 25 juin notre AG statutaire mais elle se tiendra pour la première fois de manière dématérialisée, compte tenu des mesures de prudence Covid-19. Ce sera l’occasion notamment de donner une pleine légitimité à notre conseil d’administration élu cet hiver et qui attend la validation de l’AG pour être officiellement présenté. Mais j’espère que nous pourrons tenir dès que possible des rencontres sur le terrain avec toutes les forces vives de l’agriculture.
Comment la FNSEA 27 a-t-elle vécu le confinement ?
La FNSEA 27 a dû s’adapter très vite à la situation de confinement et a basculé le 17 mars du jour au lendemain en télétravail. Nous pouvons nous féliciter de la souplesse et la bonne volonté de tous les collaborateurs qui ont immédiatement transféré leurs outils professionnels (lignes téléphoniques comprises) à leur domicile. Tous les services ont été maintenus malgré la contrainte ; je citerai un seul chiffre pour illustrer la continuité de services : 100 % des adhérents inscrits chez nous pour leur déclaration Pac ont été traités avant la date du 15 mai. Nous avons garanti ainsi à tous ceux qui nous ont fait confiance qu’ils percevraient leur acompte Pac à la date prévue, sans décalage. Nous avons souhaité aussi en collaboration avec l’AS 27 AGC vous informer quasi quotidiennement le premier mois du confinement sur tout ce qu’il fallait savoir pour vous adapter. Vous avez été nombreux à témoigner votre satisfaction et je vous en remercie. Nous avons travaillé avec beaucoup d’ardeur pour faciliter la vie à nos agriculteurs dans cette période particulière avec des contacts quotidiens avec la préfecture et la DDTM sur tous les sujets (attestations de transports, ouverture des marchés, des cueillettes, autorisation d‘ouverture de magasin…).
Quel bilan tirez-vous de la périodede confinement pour l’agriculture ?
La période de confinement a eu ses bons et mauvais côtés pour l’agriculture. Certains secteurs ont subi immédiatement les conséquences du ralentissement mondial de l’économie et de la fermeture des frontières ; c’est par exemple le cas de la filière lin qui est très durement touchée ; la restauration hors domicile ayant fermé ses portes près de trois mois, les filières qui l’approvisionnait ont été lourdement impactées (viande, lait, pommes de terre…) et il y a bien d'autres filières touchées (horticulture…). Heureusement, certains ont pu tirer leur épingle du jeu en imaginant de nouveaux débouchés ou de nouvelles façons de commercialiser, en circuit court notamment. Et puis, la population française a redécouvert depuis le confinement l’intérêt d’une agriculture française qui lui permet de se nourrir dans d’excellentes conditions de qualité et de sécurité sanitaires. Le déconfinement a débuté même si toutes les activités économiques n’ont pas pleinement repris.
Comment voyez-vous la suite ?
Il faut préparer activement la sortie de crise. C’est ce que font la FNSEA, l’APCA qui livrent actuellement des propositions au gouvernement pour booster l’avenir de notre agriculture. Nous devons cependant rester vigilant car nos détracteurs sont très actifs. Par ailleurs, l’Europe est en train de réfléchir tout haut à sa nouvelle Politique Agricole Commune, notre gouvernement se pose toujours la question de traités multilatéraux avec des pays qui présente des éléments de compétitivité déloyaux par rapport à nous mais aussi des normes non équivalentes aux nôtres… Nous l’avons maintes fois répété : n’importons pas l’agriculture que nous ne voulons pas. Le sujet de la maîtrise foncière reste d’une grande actualité, l’installation de jeunes agriculteurs aussi. Je ne suis pas non plus sans inquiétude sur la situation climatique et le début de sécheresse que nous anticipons pour la moisson à venir. Nous avons demandé au préfet une dérogation pour l’utilisation des jachères, et nous allons mettre en place, comme en 2019, une opération de mise en relation des éleveurs qui ont besoin de fourrage avec les agriculteurs qui ont du stock à céder.
Un mot pour conclure ?
Nous allons être très actifs pour préparer l’avenir de notre agriculture. Sur tous les sujets concernant les agriculteurs, la FNSEA 27 reste pleinement investie à son niveau départemental en collaboration avec JA et la chambre d’agriculture de l’Eure mais également au niveau régional avec la FRSEA et au niveau national bien sûr, niveau vers lequel nous relayons régulièrement des messages. Proximité, soutien aux agriculteurs, construction et prospectives seront nos maîtres mots pour la période qui vient.