Filière bovine : l'ouest décapitalise plus qu'ailleurs.
Succès pour les rencontres bovines Ter'élevage qui se sont déroulées le 7 décembre dernier à Noyers-Bocage (14). 280 animaux présents autour de 180 éleveurs pour tenter de redynamiser une filière bovine qui décapitalise plus à l'ouest que dans le reste de l'Hexagone.
mobilise malgré l'envolée des coûts de production.
Et si on arrêtait de décapitaliser ? C'est un peu le challenge qu'ont proposé Estelle Mirande (présidente de la commission bovine de Ter'élevage) et son directeur général, Jérôme Arbus, lors de la journée « Les rencontres bovines » qui s'est déroulée le 7 décembre dernier à Noyers-Bocage dans le Calvados devant plus de 180 éleveurs.
NOTRE ELEVAGE FOUT LE CAMP
La Normandie et par extension le Grand Ouest de la France, terre d'élevage par excellence, serait-elle en train de perdre ses fondamentaux ? La question mérite d'être posée eu égard à une décapitalisation du cheptel (lait + viande) amorcée depuis plusieurs mois et plus marquée localement que dans le reste du territoire. « On décapitalise plus chez nous que dans le Massif Central, a illustré à titre d'exemple Jérôme Arbus. 4,5 % d'abattage en moins dans l'ouest sur octobre-novembre 2022 ». Un phénomène multifactoriel. Aux difficultés inhérentes et aux aléas du métier d'éleveur sont venus se greffer une embellie du cours des céréales et oléoprotéagineux influant certaines stratégies d'exploitations agricoles, un mouvement anti-viande qui pèse peu dans l'assiette mais sape le moral de ceux qui se posaient déjà des questions, des coûts de production en forte hausse que la situation géopolitique n'a fait qu'accentuer depuis février 2022...
Il est vrai que le coût alimentaire (sans parler de l'énergie) a progressé de 150 % en un an et que l'Ipampa viande bovine affiche 137 % dans un contexte global d'inflation de 6 %. La production a donc décroché (64 000 vaches en moins au 1er septembre 2022 par rapport à 2021) alors que la demande (mondiale et nationale) est toujours là. Conséquence : « une hausse des cours spectaculaire en vache, JB (Jeune Bovin) et broutards. Au niveau européen, c'est la même chose », explique Jérôme Arbus qui fait également remarquer le resserrement entre vache laitière et vache à viande. Les éleveurs auront apprécié sans nul doute mais la balance n'est toujours pas rééquilibrée et 2022 se solde par un niveau d'abattage en très fort repli même si la France retrouve un peu de compétitivité au niveau européen.
ITALIE, ESPAGNE ET PAYS-BAS EN RETRAITS
Et quid demain ? « La demande va continuer à croitre : + 60 % de consommation de viande et + 60 % d'habitants en 30 ans, comment va-t-on nourrir le monde ?» questionne-t-on du côté de Ter'élevage. Une inquiétude d'autant plus légitime dans un contexte de réchauffement climatique. L'hémisphère sud (Brésil, Australie...) sera plus impacté que l'hémisphère nord au sein duquel Espagne et Italie seront plus impactés que la France. Parallèlement, les Pays-Bas affichent un objectif de 30 % d'élevage en moins pour des questions environnementales (lire ci-dessous) ; « ils ne vont plus engraisser chez eux ».
Un train passe et siffle peut-être à l'ouest. Pour autant, l'équation n'est pas simple à résoudre, tout est question de compétitivité. « La filière ne pourra pas se permettre de proposer des prix en dessous des coûts de production sinon la décapitalisation va encore s'accélérer », pronostique Jérôme Arbus qui milite pour une filière forte.
En attendant, les collectivités locales s'approvisionnent en viande polonaise ou irlandaise pour des questions d'équilibre financier. Le consommateur français se détourne de la viande bio (- 30 %) pour se reporter vers les premiers prix. La Chine ne s'approvisionne qu'à hauteur de 50 % de ses besoins auprès de ses dix plus gros fournisseurs habituels... De nouveaux équilibres dans les marchés mondiaux se profilent, la Normandie saura-t-elle tirer son épingle du jeu ? Cela dépend aussi d'une certaine volonté politique !