Jeunes Agriculteurs : la loi d’orientation en ligne de mire.
Le 55e congrès des Jeunes Agriculteurs (JA) s’est tenu les 30, 31 mai et 1er juin au Havre. L’occasion pour lui de renouveler ses instances dirigeantes et de rappeler sa volonté de peser lors de la prochaine loi d’orientation agricole. Une table ronde a par ailleurs abordé les conséquences de la guerre en Ukraine.
présents au congrès.
En cette période de réserve électorale, le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, s’est contenté, lors de la journée de clôture le 1er juin, d’une courte vidéo dans laquelle il a dressé, à grands traits, les thèmes essentiels de la future loi d’orientation agricole : une agriculture décarbonée, la formation, la transmission et le renouvellement des générations, la gestion des risques, la nécessaire adaptation au changement climatique et la juste rémunération des agriculteurs. « Saisissez-vous de ces sujets. Vous avez un rôle majeur à jouer », a-t-il exhorté. La veille, le ministre, qui est candidat aux législatives dans le Loir-et-Cher, était venu sur place pour une rencontre à huis clos avec les instances dirigeantes de JA qui ont été renouvelées.
« PRODUIRE DAVANTAGE »
Le nouveau président, Arnaud Gaillot, qui a salué le travail accompli par son prédécesseur, Samuel Vandaele, a insisté sur le renouvellement des générations « qui doit être la pierre angulaire de la prochaine loi d’orientation, car c’est un enjeu démographique inédit qui nous attend ». Il souhaite que le futur texte dont l’examen devrait commencer lors de la prochaine session parlementaire « attire, forme et conserve » les agriculteurs dans les fermes et qu’il puisse « promouvoir nos métiers, préserver nos terres et nous rémunérer », a-t-il martelé. Peu auparavant, la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert, avait aussi rappelé la nécessité de faire front commun sur la question de la transmission, car « transmettre est un choix qui engage ». Comme Arnaud Gaillot, elle pense qu’à l’aune des crises qui se cumulent depuis deux ans, « les champs du possible sont très ouverts », car l’agriculture est aujourd’hui sollicitée et attendue. « Nous sommes reconnus comme un secteur essentiel », a-t-elle dit. Elle veut voir l’opportunité de pousser des dossiers comme celui de l’innovation, notamment les NBT « car il faut remettre la science au cœur des débats », a renchéri Arnaud Gaillot. La FNSEA et JA entendent d’ailleurs battre le fer tant qu’il est chaud sur le développement de la production agricole européenne. « Car Mme Ursula Van der Leyen semble avoir compris qu’il fallait produire davantage : + 30 % en deux ans », a souligné Christiane Lambert pas mécontente de ce changement de cap de la part de la présidente de la Commission qui, jusqu’à présent, faisait la sourde oreille sur ce sujet.
ARME ALIMENTAIRE
Ce sujet a d’ailleurs été central lors d’une table ronde, consacrée aux conséquences de la guerre en Ukraine, réunissant Jean-François Loiseau, président d’Intercéréales, Matthieu Brun, directeur scientifique de la fondation Farm et Guillaume Larroque, président marketing de TotalEnergies. « Produire plus est une absolue nécessité », a martelé le premier quand le second a acquiescé prenant l’exemple des pays d’Afrique du Nord à la recherche de solutions pour « limiter leurs dépendances » aux céréales russes et ukrainiennes. Dépendances que le conflit entre les deux pays a mises en lumière. « Pour des pays comme l’Égypte ou le Liban, le réveil a été brutal », a concédé Jean-François Loiseau. « Certains dirigeants nous ont appelés à l’aide (…) Sans la PAC, la France importerait sans doute ses céréales d’Ukraine », a-t-il témoigné. Guillaume Larroque veut voir dans cette guerre « l’opportunité de relocaliser, y compris l’agriculture, l’alimentation et l’énergie », a-t-il déclaré. Les trois intervenants se sont accordés à reconnaître que la Russie a réussi, à la faveur d’une volonté politique sans faille, à mettre les moyens nécessaires pour construire une agriculture aujourd’hui performante. « Sa prochaine récolte de blé devrait atteindre 85 à 90 millions de tonnes », a estimé Jean-François Loiseau. De quoi user de cette arme alimentaire et rappeler que « dans ce domaine, l’agriculture est éminemment stratégique », a conclu Matthieu Brun.