« Les révolutions se font maintenant à la Maison. »
A l’occasion d’une nouvelle action syndicale en grandes surfaces le 18 mars 2021, nous rencontrons Laurent Duclos qui appelle tous les agriculteurs à s’engager, quelle qu’en soit la forme.
Laurent Duclos, vous êtes président de la section laitière de la FNSEA 27. Qu’êtes-vous en train de faire ?
En compagnie de plusieurs agriculteurs, nous sommes actuellement en train de contrôler l’étiquetage dans plusieurs grandes surfaces. Cette action intervient dans le prolongement de celle menée le 24 février, à l’initiative de la FNSEA 27 et des JA, lors de laquelle nous avions déversé plusieurs dizaines de tonnes de fumier sur 5 Intermarché de l’Eure. Jusque-là, seul Intermarché s’était obstiné à ne pas nous écouter. Nous avons donc dû nous résigner à passer à l’action et je remercie encore tous les éleveurs qui se sont déplacés avec leurs bennes ou banderoles afin d’essayer de faire plier les mousquetaires.
Pourquoi ce contrôle d’étiquetage et ce relevé de prix aujourd’hui ?
Depuis plusieurs années, notre section laitière fait régulièrement des relevés de prix dans les grandes surfaces. Le but est de rappeler à l’ordre chaque directeur lorsque nous trouvons des premiers prix non rémunérateurs pour les producteurs ou des erreurs d’étiquetages (usage abusif du logo origine France par exemple). Il s’agit d’une forme de combat complémentaire et l’important est d’assurer ensuite une communication efficace sur ce que nous avons relevé.
Quel bilan tirez-vous de ces actions ?
Bien que volontairement peu nombreux sur place, nos actions prennent de l’envergure grâce à tous ceux qui ont twitté ou partagé ces vidéos sur les réseaux sociaux, car l’important est de faire passer nos messages directement aux consommateurs tout en égratignant l’image des enseignes peu vertueuses. Les premières condamnations tombent d’ailleurs dans le cadre d’EGALIM, avec 150 millions d’euros pour le seul groupe Intermarché.
Comment capitaliser sur vos actions de terrain ?
Comme le dit si bien Jean Louis Aubert, « les révolutions se font maintenant à la maison » et pour être un syndicaliste actif aujourd’hui, il n’est plus forcément besoin de fouler le pavé, mais de communiquer par nos propres réseaux. Je salue d’ailleurs le lancement des premiers webinaires de la FNSEA 27 qui permettent de diffuser de l’information de manière interactive.
Ainsi, l’action du 24 février a généré plus de 1 269 partages et 195 800 personnes touchées rien que sur le compte Facebook FNSEA27. L’impact a même dépassé nos frontières avec des demandes d’interview de journalistes étrangers se demandant comment notre modèle agricole français reconnu mondialement pour sa technicité, sa modernité et son savoir-faire en était toujours à se battre pour survivre.
C’est pour cela que j’invite tous les agriculteurs à continuer, chacun à leur niveau, de vérifier les premiers prix de nos denrées agricoles en rayon et de nous remonter l’information s’ils sont abusifs (moins de 74 centimes le litre de lait demi-écrémé) via notre réseau Facebook FNSEA27 ou par email. Toute erreur d’étiquetage d’origine doit nous être signalée et nous transmettrons systématiquement à la DGCCRF. C’est ainsi que nous arriverons à changer ces comportements.
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Communiqué FNSEA / FNPL / JA : Annulation du décret sur l’étiquetage de l’origine du lait : un retour en arrière inacceptable
Précurseur dans le domaine de l’étiquetage de l’origine, la France mène une expérimentation de l’étiquetage de l’origine du lait, du lait incorporé dans les produits laitiers et des viandes utilisées comme ingrédients dans des produits transformés depuis le 1er janvier 2017. Dans une décision rendue hier, le Conseil d’État a répondu favorablement à la demande de Lactalis de mettre à bas cette expérimentation et d’interdire la mention obligatoire de l’origine du lait sur les produits laitiers vendus en France.
La Fédération nationale des Producteurs de lait, Jeunes Agriculteurs et la FNSEA regrettent profondément cette décision et dénoncent l’attitude irresponsable d’un acteur économique qui va à l’encontre de la reconnaissance du travail des éleveurs laitiers français. En donnant raison à Lactalis, le Conseil d’État empêche les consommateurs de connaître la provenance de leur alimentation, et de choisir librement les produits qu’ils consomment.
Cette décision est à contre-courant de l’Histoire, puisqu’un certain nombre d’autres États membres ont entre-temps rejoint la France dans sa démarche. Qu’un tel texte fondateur ait pu être remis en cause alors même qu’il est créateur de valeur pour la Ferme France et permet d’informer le consommateur sur l’origine et la traçabilité de ce qu’il consomme est un très mauvais signal. Cette décision mine, en effet, les efforts de longue date, engagés par les agriculteurs français pour répondre aux attentes des citoyens, qui doivent permettre à la profession agricole de se rémunérer dignement. Alors que l’Assemblée nationale examine en ce moment même le projet de loi visant à diminuer nos émissions de gaz à effet de serre, nous rappelons qu’un revenu digne et une alimentation plus locale sont des conditions sine qua non de la transition agroécologique et de la lutte contre le changement climatique.
Face à cette décision, nous demandons à l’État une réaction forte :
- Tout mettre en œuvre pour remettre en place cette nécessaire obligation d’étiquetage,
- Maintenir les dispositions du décret concernant les viandes en tant qu’ingrédients,
- Afficher un cap à la hauteur de l’enjeu pour les travaux du Conseil National de la Consommation sur l’étiquetage de l’origine des denrées transformées avec un dispositif simple et apportant toute la transparence nécessaire. En effet, l’autre enjeu en ligne de mire est bien sûr la stratégie Farm to fork, dont la FNSEA et JA attendent une reprise au niveau européen de nos demandes.
Plus que jamais la transparence est une nécessité du producteur au consommateur !