Sevépi : une année correcte dans un contexte difficile.
Une année correcte au regard d’une année difficile due à une baisse de la collecte et à la crise sanitaire. Tel est le bilan dressé par les responsables de Sevépi lors de l’assemblée générale de la coopérative qui s’est tenue le 14 décembre dernier à St-Aubin-sur-Gaillon (27). « Le premier facteur de réussite dans la qualité des productions reste le travail et la fidélité de nos adhérents, si chère à nos valeurs et qui nous permet de pérenniser nos débouchés », a insisté son président, Jérôme Charpentier
« Nous pensions que l’exercice 2020-2021 serait sans bonne surprise en raison d’un volume de collecte faible dû à un climat sec. Fort heureusement, les qualités étaient bonnes et les prix n’ont cessé de monter, toutes cultures confondues, a rappelé Jérôme Charpentier (président de Sevépi) avant d’enchaîner : la récolte 2021 a été réalisée dans des conditions météorologiques à l’opposé de 2020 et ce sont les PS (Poids Spécifique) qui ont été impactés. Les rendements sont hétérogènes et les volumes collectés par la coopérative seront supérieurs à la campagne dernière ». Dans un contexte climatique tout aussi volatil que le cours mondial des céréales ou celui des engrais, il faut une grande résilience pour maintenir fermement le cap. Sevépi en fait preuve malgré un CA (Chiffre d’Affaires) en recul de 7,9 % sous l’effet de la forte baisse de la collecte, mais ses fondamentaux lui permettent d’envisager l’avenir avec plus de sérénité. La construction du silo de Bréval avance à bon train et sera opérationnel pour la moisson 2022. Parallèlement, l’objectif de valoriser à hauteur de 40 % la collecte en contrats filières a été réaffirmé. « La moisson 2021 et ses problèmes de qualité, notamment sur les bas PS en blé, montrent une fois de plus que les négociations sont difficiles avec les exportateurs alors que nous arrivons à trouver un consensus avec nos partenaires locaux. Cela nous renforce donc dans notre objectif de valoriser, d’ici 2 ans, 40 % de nos produits collectés en contrats filières », justifie Aurélien Caurier (directeur de Sevépi).
Un retard azoté qui ne se rattrapera pas
De quoi rassurer les adhérents sur le moyen terme, mais c’est sur le court terme que plane le doute. La question de la disponibilité en engrais azoté, et à quel prix, est sur toutes les lèvres. « 300 000 t de retard de livraison en décembre, annonce Patrick Loison (Inoxa), un retard que l’on n’arrivera pas à rattraper ». Comment en est-on arrivé là ? Avec 2,4 Mt de solution azotée vendue en France, notre pays ne pèse que 0,7 % des volumes mondiaux. « Inoxa, c’est 20 % du marché national, mais on n’arrive pas à capter les offres. Plus un seul kilo de fertilisant ne sort de Chine depuis le 15 octobre et, parallèlement, la Russie a considérablement réduit la voilure. Le produit est très dépendant de l’international et on sort de deux années basses qui ont engendré des restructurations ».
La rareté explique l’envolée des prix, mais pas que, « 30 à 40 $/t d’augmentation du coût du fret », sans parler localement du manque de camions et de chauffeurs. Pour les peu et à fortiori les pas couverts, il ne sera pas facile de faire de la protéine en 2022. C’est pourtant ce qu’exige, et de façon de plus en plus drastique, le marché export (50 % du débouché hexagonal). Et la messe n’est peut-être pas totalement dite. L’étau se resserre en France sur le stockage de l’ammonitrate. Il serait soumis à déclaration au-delà de 10 t, une conséquence de l’explosion de Beyrouth (Liban). « On est très bien soutenu sur ce dossier par le ministre de l’Agriculture », croit-on savoir, mais les arbitrages ne virent pas toujours en faveur de Julien Denormandie.
Les « emmerdes » volant souvent en escadrille, penchez-vous maintenant sur le pulvérisateur et les produits phytosanitaires que vous mettez dedans. « Achetez un maximum par anticipation, préconise Rodolphe Coquillard (Invivo PPA). Le contexte phyto, qui était relativement stable, va subir de la volatilité. Nous sommes confrontés à une baisse de capacité de production de matières actives, à des pénuries de chauffeurs formés au transport de matière dangereuse, le tout dans un contexte de marché en croissance en Amérique du Sud. Il faut s’attendre à une inflation significative avec des difficultés d’approvisionnement à partir de début 2022 jusqu’au printemps 2023 au moins ».
Pour finir sur une note d’optimisme : « pas de spectre sur un éventuel effondrement du prix du blé dans les prochains mois, mais on n’a pas de place pour un incident climatique non plus », conclut Arthur Portier (Agritel).