La lentille verte : une culture au débouché sécurisé.
Terres Inovia a convié agriculteurs, techniciens agricoles et étudiants en agronomie, le 16 novembre au
Havre, pour l'une de ces rencontres techniques régionales afin de présenter les cultures de diversification sur
lesquelles l'institut travaille. Parmi celles-ci, la lentille verte.
Pourquoi se diversifier ? L'intérêt est multiple, comme aiment à le rappeler devant l'auditoire présent, Zoé Le Bihan, ingénieure Terres Inovia, référente lentille et lin oléagineux, et Lucie Fouray, coordinatrice de projets agronomiques chez NatUp avec laquelle l'institut collabore.
Parmi ces atouts, on lui attribue :
- un intérêt agronomique dans la rotation et l'effet du précédent ;
- un intérêt économique avec une répartition des risques encourus et des aides PAC en faveur des légumineuses ;
- un débouché sécurisé, contractualisé avec la coopérative NatUp pour approvisionner Lunor, l'une de ses filiales. Pour présenter le sujet de l'étude parcellaire - qui s'est déroulée sur deux ans -, Zoé Le Bihan rappelle tout d'abord le contexte : « Terres Inovia a accompagné NatUp sur la partie agronomique, en apportant ses conseils aux agriculteurs qui ont produit cette lentille verte Anicia, la plus représentée sur le territoire. Elle a été cultivée en conventionnelle sur neuf parcelles situées en zone nordest du secteur NatUp, autour de Breteuil dans l'Oise ». « La lentille une fois récoltée est triée, cuite et valorisée en alimentation humaine par Lunor », ajoute Lucie Fouray en précisant la stratégie de NatUp. L'objectif et la finalité de Terres Inovia ont été d'identifier les facteurs limitants et les leviers de la culture afin qu'elle se développe dans les meilleures conditions possibles.
RÉSULTATS DU SUIVI DE PARCELLES
« La lentille est une culture de printemps, si bien que nous n'avons fait que trois visites : lors de son implantation, de sa floraison et à la fin de son cycle », explique Zoé Le Bihan. « La campagne 2023 en quelques mots a bien débuté avec des levées de parcelles très homogènes, puisque nous avions des pluies très régulières. On s'est donc retrouvé avec des stades à floraison à bon potentiel de rendement. En revanche, durant l'été, comme on a eu un retour des pluies, on a eu des stades phénologiques très hétérogènes et on a rencontré des problèmes de verse et d'égrenage et donc de fortes difficultés à récolter. Conséquence des conditions climatiques, nous avons eu un salissement tardif des parcelles. En revanche, on a été plutôt tranquilles du côté des ravageurs ».
ITINÉRAIRE TECHNIQUE : FAVORISER LA LEVÉE
« On est un peu pauvre en termes de solutions pour lutter contre les adventices. En amont du semis, il convient donc de choisir une parcelle non tassée (ses racines sont très petites), drainante, avec de faibles réserves azotées », souligne Zoé Le Bihan.
Les dates de semis préconisées sur ce secteur se situent entre mars et mi-avril. Attention, le semis doit s'effectuer sur sol réchauffé (zéro de végétation à 6 °C, NDLR).
Il faut également veiller à la présence d'adventices dans les parcelles, difficiles ou pénalisantes pour l'alimentation humaine (ambroisie, morelles, datura...).
Enfin, la lentille est une culture sensible à l'Aphanomyces euteiches, une maladie racinaire tellurique (avant d'envisager son implantation, il est donc recommandé de réaliser un test de potentiel infectieux, afin d'écarter tout risque de perte de la culture, NDLR).
Concernant les densités de semis et l'objectif de peuplement, « les semis se situent entre 250 à 300 gr/m² (75-90 kg/ ha selon le PMG, et l'objectif est de 220 à 250 plantes/m² levées », précise Zoé Le Bihan.
IMPLANTATION DE LA LENTILLE
La lentille a la capacité de fixer l'azote atmosphérique grâce à une symbiose avec une bactérie du sol de genre Rhizobium (Rhizobium leguminosarum), présente naturellement dans les sols français. Il n'est donc pas nécessaire d'inoculer la lentille et ses besoins en azote sont ainsi remplis.
Cette nodulation peut être observée dès le stade 4 feuilles et jusqu'à la floraison. Les nodosités sont faciles à observer (roses et actives) pour vérifier le bon fonctionnement de la symbiose. Pour résumer, parmi les facteurs de risques de la culture, on note « les larves des sitones, les sols compactés, les maladies du système racinaire, un sol en pH acide et un déficit de phosphore ».
UNE ÉTAPE CLÉ : LA GESTION DES ADVENTICES
Sur les parcelles observées, on a donc relevé un très fort salissement lié aux conditions météo de l'été 2023. « Lors de la première visite, on a trouvé la présence de ray-grass, de chardons et de mercuriales ; lors de la seconde visite, des chardons, des mercuriales et des laiterons ; enfin, lors de la troisième et dernière visite, des fumeterres, des renouées, des ray-grass, et de la folle avoine ». Rappelons-le, les solutions de désherbage en lentille étant très pauvres, il convient de ne pas faire d'impasse sur la prélevée.
Et en forme de bilan de campagne, « on a constaté une forte variabilité de rendement à l'échelle du réseau NatUp », conclut l'ingénieure.